Cahiers de l’émigration russe n° 8
édité par Geneviève Johannet & Nikita Struve
ISBN 978-2-7204-0395-8, 2004, 80 p.
Le cinquantième anniversaire de la mort de Berdiaev a montré une fois de plus l’actualité persistante de ce philosophe inclassable. Penseur toujours engagé, doublé d’un imprécateur (n’avait-il pas été l’un des premiers Russes à découvrir Léon Bloy), animé par une foi au Christ-Dieu qui après les errements de la jeunesse ne s’est jamais démentie, Berdiaev est de ces intelligences tourmentées et lumineuses qui, comme Kierkegaard, ne cesse de nous interpeller et de nous éveiller, peut-être plus à la vie de l’esprit, qu’à celle de la pensée proprement dite.
La force de Berdiaev vient de son assurance dans la dignité de l’homme, non pas esclave de Dieu, ni simplement objet du salut, mais mieux et plus, co-créateur. Cette assurance détermine l’exigence religieuse, qui dans les courants religieux amoindrit la signification de l’homme et limite la sphère de son activité créatrice. La destinée et la dignité de l’homme résident dans sa vocation à être le libre collaborateur de Dieu, Dieu lui-même ayant besoin de cette collaboration.
La quête chevaleresque d’un ordre humain qui puisse correspondre à la haute vocation de l’homme, n’a cessé d’animer Berdiaev et de nourrir son combat, même si parfois son impatience de le voir se réaliser a pu le placer dans des situations inconfortables.