par Andreas KAPPELER, traduit de l'allemand par Guy Imart
ISBN 2-7204-0305-9, 1994, 416 p.
Ce livre est important.
Il n'est surtout pas une énième Histoire de Russie qui simplement engloberait l'appendice "colonial" de ce pays. Paradoxalement sans doute, mais sûrement, il établit les bases sur lesquelles il sera un jour possible d'écrire - ce qui n'a encore jamais été fait - une Histoire des Russes.
Loin de reprendre la polémique sur les éternelles "questions maudites" - toujours aussi désespérément russocentristes dans un État où les Russes ont, presque toujours, été minoritaires et où le Pouvoir n'a jamais fait grand cas de leurs intérêts - il aborde de face la question préalable, impertinemment posée en 1915 par André Biély dès la première ligne de son roman Pétersbourg "Mais qu'est donc notre Empire russe ?" En réintroduisant dans le débat la dimension, aussi nouvelle en historiographie que constante dans la réalité historique, du multiethnisme, Andreas Kappeler n'apporte pas un point de vue complémentaire - et donc secondaire - qui viendrait éclairer de façon marginale l'une des facettes de l'histoire, déjà connue, d'un État "comme les autres". Il met en lumière le ressort essentiel de l'activité de l'État en Russie, dévoilant par là-même sa nature profonde.